Séance n°5 : Des lieux de rencontre avec les livres…

Objectif : repérer les éléments d’une description, mener une étude comparative

Support : pages 22 à 24 de la Bibliothécaire, extrait des Mots de Jean-Paul Sartre ; extrait de Vingt Mille Lieues sous les mers de Jules Verne

En classe, on analyse les textes selon deux axes :

1. Les points communs

- le personnage (jeunesse, étrangeté par rapport au monde des livres…)

- le lieu et l’atmosphère (l’insistance sur la multitude de livres, la bibliothèque comme lieu de mémoire et de savoir, comme sanctuaire…)

- les sentiments suscités (admiration, respect…)

2. Les différences

- le type de narrateur (il / je)

- les temps du récit (présent / passé)

- le type de bibliothèque (publique / privée)

- la représentation des livres (réaliste / imagée)

Nb : ces deux axes serviront pour le bilan

I : Quelles sont les définitions du mot « bibliothèque » ? quelle est l’étymologie de ce mot ?

Le mot « bibliothèque » désigne :

un lieu -pièce ou établissement- public ou privé, où est rangée une collection de livres, d’imprimés, de manuscrits, etc.

Ce mot est également utilisé pour désigner un meuble à tablettes destiné à ranger ces livres.

Le terme évoque parfois aussi, de façon plus abstraite, une collection de livres, d’imprimés…

    On dit qu'il est polysémique

Ce mot est d’origine grecque ; il est composé des mots biblion, qui signifie « livre » et théké qui signifie « armoire ». Il fait partie des mots de formation savante.

  Recherchez d’autres mots français contenant le mot biblion  et théké.

II : Deux sortes de bibliothèque

De quelle bibliothèque est-il question dans le texte de Gudule ? Relevez les différents termes qui la désignent. Recopiez la phrase qui la décrit le mieux.

Dans le texte de Gudule, il est question d’un lieu, et, plus précisément, de la salle de la bibliothèque municipale que découvre le héros, jusqu’alors peu intéressé par les livres. La bibliothèque est désignée par les termes « endroit » (extraordinaire), « lieu » (qui impressionne), « salle ». Mais l’auteur l’évoque aussi grâce à deux expressions métaphoriques : « cette salle, noyau lumineux au cœur de la batisse obscure » ; « dans le sanctuaire. »

Le texte comporte deux phrases qui décrivent la bibliothèque : « des rayonnages couvrent les murs et s’alignent les uns derrière les autres, formant d’étroites allées » ou « la somme de connaissances humaines emplit cette salle, noyau lumineux au cœur de la bâtisse obscure. »

  De quelle bibliothèque est-il question dans le texte de Sartre ? Dans quelle pièce d’habitation se trouve-t-elle ?

Dans le texte de Sartre, le mot bibliothèque désigne un meuble empli de livres : les livres se trouvent « sur les rayons de la bibliothèque ». Ce meuble est placé dans le bureau du grand-père du narrateur.

  Quelles sont les principales caractéristiques des livres qui se trouvent dans la bibliothèque évoquée par Gudule ? Compléter le tableau

Les principales caractéristiques sont les suivantes :

-ils sont nombreux, si nombreux que l’enfant qui les découvre est incapable de donner un ordre de grandeur.

-les formes prises par l’objet-livre sont très diverses.

  Quels sont les différents procédés grammaticaux qui mettent ces caractéristiques en valeur ?

Le narrateur recourt au procédé de l’interrogation qui souligne la perplexité du personnage. L’énumération met en valeur son étonnement émerveillé.

  Quelles sont donc, d’après Gudule, les deux fonctions d’une bibliothèque ?

En ce qui concerne les livres :

Elle rassemble en un seul lieu tout le savoir du monde

Elle joue le rôle de conservatoire dans le temps et protège les ouvrages contre la destruction et l’oubli.

En ce qui concerne les lecteurs :

Elle offre l’occasion d’accéder à au savoir actuel et passé.

III : L’enfant et le livre

  Texte I Texte II Texte III
Lieu Une bibliothèque municipale Le bureau du grand-père Une salle  ingénieusement aménagée en bibliothèque à bord d’un sous-marin
Leur nombre

 

 

 

Leur aspect

 

 

 

le genre et la variété

combien y a-t-il de livres ici ? Dix mille ?, Cent mille, un million ?

la somme des connaissances humaines emplit cette salle.

couverture de cuir, de tissu, de carton aux tranches dorées, parchemins roulés, éditions rares et volumes populaires pleins de naïves illustrations

tout le savoir du monde semble rassemblé ici

 

 

 

Un grand nombre ; douze mille 

 

 

 

Uniformément reliés

 

 

volumes, reliures, journaux, de science, de morale et de littérature, en toute langue 

Il y en avait partout 

 

 

ces pierres levées, droites ou penchées,  elles se ressemblaient toutes 

 

 

 

 

Relation du personnage avec le livre en général En général, il ne manifeste pas de goût pour les livres ni pour la lecture Il manifeste du respect pour les livres  avant même de savoir lire  
sentiment éprouvé ou manifesté par le personnage Guillaume est étonné par le lieu qu’il découvre et éprouve un sentiment de respect pour les richesses qu’il contient Le narrateur exprime un sentiment de respect qu’il a toujours ressenti pour les livres et affirme qu’il ne peut concevoir la vie ailleurs qu’au milieu des livres car c’est leur fréquentation qui donne un sens à la vie Il éprouve de l’admiration pour le lieu, il est émerveillé
narration (faite à la 1ière ou 3ième personne) Le narrateur rapporte les faits à la 3ième personne ; il est extérieur à l’histoire Le narrateur rapporte les faits à la 1ière personne ; le narrateur est aussi personnage de l’histoire Le narrateur rapporte les faits à la 1ière personne ; le narrateur est aussi personnage de l’histoire
Temps du récit Présent de narration qui donne du suspens à la découverte de ce nouveau lieu par Guillaume Imparfait dominant Imparfait dominant

La bibliothèque du capitaine Nemo

            C’était une bibliothèque. De hauts meubles en palissandre noir, incrustés de cuivre, supportaient sur leurs larges rayons un grand nombre de livres uniformément reliés. Ils suivaient le contour de la salle et se terminaient à leur partie inférieure par de vastes divans, capitonnés de cuir marron, qui offraient les courbes les plus confortables. De légers pupitres mobiles, en s’écartant ou en se rapprochant à volonté, permettaient d’y poser le livre en lecture. Au centre se dressait une vaste table, couverte de brochures, entre lesquelles apparaissaient quelques journaux déjà vieux. La lumière électrique inondait tout cet harmonieux ensemble, et tombait de quatre globes dépolis à demi engagés dans les volutes du plafond. Je regardais avec une admiration réelle cette salle si ingénieusement aménagée, et je ne pouvais en croire mes yeux.

            « Capitaine Nemo, dis-je à mon hôte, qui venait de s’étendre sur un divan, voilà une bibliothèque qui ferait honneur à plus d’un palais des continents, et je suis vraiment émerveillé, quand je songe qu’elle peut vous suivre au plus profond des mers.[…]

_Vous possédez là six ou sept mille volumes…

_Douze mille, monsieur Aronnax. Ce sont les seuls liens qui me rattachent à la terre. Mais le monde a fini pour moi le jour où mon Nautilus s’est plongé pour la première fois sous les eaux. Ce jour-là, j’ai acheté mes derniers volumes, mes dernières brochures, mes derniers journaux, et depuis lors, je veux croire que l’humanité n’a plus ni pensé ni écrit. Ces livres, monsieur le professeur, sont d’ailleurs à votre disposition, et vous pouvez en user librement. »

            Je remerciai le capitaine Nemo, et je m’approchai des rayons de la bibliothèque. Livres de science, de morale et de littérature, écrits en toute langue, y abondaient ; mais je ne vis pas un seul ouvrage d’économie politique ; ils semblaient être sévèrement proscrits du bord. Détail curieux, tous ces livres étaient indistinctement classés, en quelques langues qu’ils fussent écrits, et ce mélange prouvait que le capitaine du Nautilus devait lire couramment les volumes que sa main prenait au hasard.

 

Les livres du grand-père de Jean-Paul Sartre

            J’ai commencé ma vie comme je la finirai sans doute : au milieu des livres. Dans le bureau de mon grand-père, il y en avait partout ; défense était faite de les épousseter sauf une fois l’an, avant la rentrée d’octobre. Je ne savais pas encore lire que, déjà, je les révérais, ces pierres levées : droites ou penchées, seules comme des briques sur les rayons de la bibliothèque ou noblement espacés en allées de menhirs, je sentais que la prospérité de notre famille en dépendait. Elles se ressemblaient toutes, je m’ébattais dans un minuscule sanctuaire, entouré de monuments trapus, antiques, qui m’avaient vu naître, qui me verraient mourir et dont la permanence me garantissait un avenir aussi calme que le passé. Je les touchais en cachette pour honorer mes mains de leur poussière mais je ne savais trop qu’en faire et j’assistais chaque jour à des cérémonies dont le sens m’échappait : mon grand-père _ si maladroit d’habitude, que ma mère lui boutonnait ses gants _  maniait ces objets avec culturels avec une dextérité d’officiant. Je l’ai vu mille fois se lever d’un air absent, faire le tour de sa table, traverser la pièce en deux enjambées, prendre un volume sans hésiter, sans se donner le temps de choisir, le feuilleter en regagnant son fauteuil, par un mouvement combiné du pouce et de l’index puis, à peine assis, l’ouvrir d’un coup sec « à la bonne page » en le faisant craquer comme un soulier.

  Séance n°6