Séance 6 : Lecture / Grammaire : La distribution des rôles dans le conte

Objectif : Découvrir le schéma actantiel

Support : Les Trois Plumes de Grimm

Les Trois Plumes

            Il était une fois un roi qui avait trois fils : deux qui étaient intelligents et avisés, tandis que le troisième ne parlait guère et était sot, si bien qu’on l’appelait le Simplet. Lorsque le roi devint vieux et qu’il sentit ses forces décliner, il se mit à songer à sa fin prochaine et ne sut pas auquel de ses fils il devait laisser le royaume en héritage. Alors il leur dit :

_Partez, et celui qui me rapportera le tapis le plus beau sera roi après ma mort.

Afin qu’il n’y ait pas de dispute entre eux, il les conduisit devant son château et souffla trois plumes en l’air en disant :

_Là où elles voleront, telle sera votre direction.

L’une des plumes s’envola vers l’Ouest, l’autre vers l’Est, quant à la troisième elle voltigea tout droit à faible distance, puis retomba bientôt par terre. Alors, l’un des frères partit à droite, l’autre à gauche, tout en se moquant du Simplet qui dut rester près de la troisième plume qui était tombée tout près de lui.

Le Simplet s’assit par terre et il était bien triste. C’est alors qu’il remarqua tout à coup qu’une trappe se trouvait à côté de la plume. Il leva la trappe et aperçut un escalier qu’il se mit à descendre. Il arriva devant une porte, frappa et entendit crier à l’intérieur :

Petite demoiselle verte,
Cuisse tendue,
Et patte de lièvre,
Bondis et rebondis,
Va vite voir qui est dehors ; "

La porte s’ouvrit et il vit une grosse grenouille grasse assise là, entourée d’une foule de petites grenouilles. La grosse grenouille lui demanda quel était son désir.

_J’aimerais avoir le plus beau et le plus ouvragé des tapis, répondit-il.

Alors elle appela une jeune grenouille à qui elle dit :

" Petite demoiselle verte,
Cuisse tendue,
Et patte de lièvre,
Bondis et rebondis,
Va vite voir qui est dehors ; "

La jeune grenouille alla chercher la boîte et la grosse grenouille l’ouvrit, y prit un tapis qu’elle donna au Simplet, et ce tapis était si beau, si ouvragé qu’on n’en pouvait tisser de pareil sur la terre, là-haut. Alors il remercia la grenouille et remonta l’escalier. Cependant les deux autres frères estimaient leur cadet tellement, qu’ils crurent qu’il ne trouverait absolument rien à rapporter. " Pourquoi nous fatiguer à Chercher ? ", se dirent-il et la première bergère qu’il rencontrèrent fit l’affaire : ils lui ôtèrent son châle de toile grossière et revinrent le porter au roi. Au même moment le Simplet rentra lui aussi, apportant son tapis magnifique. En le voyant, le roi fut étonné et dit :

 - S’il faut s’en remettre à la justice, le royaume appartient au cadet.

Mais les deux autres ne laissèrent point de repos à leur père, lui disant qu’il était impossible que le Simplet, à qui la raison faisait défaut dans tous les domaines, devînt le roi ; ils le prièrent donc de bien vouloir fixer une autre condition. Alors le roi déclara : - Celui qui me rapportera la plus belle bague héritera du royaume.

Il sortit avec ses trois fils et souffla les trois plumes qui devaient leur indiquer la route à suivre. Comme la première fois, les deux aînés partirent l’un vers l’Est et l’autre vers l’Ouest, mais la plume du Simplet s’envola tout droit et tomba à côté de la trappe. Alors, il descendit de nouveau voir la grosse grenouille et lui dit qu’il avait besoin d’une très belle bague. La grenouille se fit aussitôt apporter la grande boîte, y prit une bague qu’elle donna au Simplet, et cette bague, toute étincelante de pierres précieuses, était si belle que nul orfèvre sur la terre n’en aurait pu faire de pareille.

Les eux aînés, se moquant du Simplet qui allait sans doute chercher un anneau d’or, ne se donnèrent aucune peine, ils dévissèrent les crochets d’une vieille roue de charrette et chacun apporta le sien au roi. Aussi, lorsque le Bêta montra sa bague d’or, le père déclara de nouveau :

 - C’est à lui que revient le royaume.

Les deux aînés ne cessèrent de harceler leur père pour qu’il posât encore une troisième condition : celui-ci décida donc que celui qui ramènerait la plus belle femme aurait le royaume. Il souffla une fois encore sur les trois plumes qui s’envolèrent comme les fois précédentes.

Alors, sans plus se soucier, le Simplet alla trouver la grosse grenouille et lui dit :

 - Il me faut ramener au château la plus belle femme.
- Hé, la plus belle femme ! répondit la grenouille. Voilà une chose qu’on n’a pas immédiatement à sa portée mais tu l’auras tout de même.
Elle lui donna une carotte évidée et creuse à laquelle six petites souris étaient attelées.
- Que dois-je faire de cela ? dit le Bêta tout triste.
- Tu n’as qu’à y installer une de mes petites grenouilles, répondit-elle.
Il en attrapa une au hasard dans le cercle de celles qui entouraient la grosse grenouille, la mit dans la carotte, et voilà qu’à peine assise à l’intérieur, la petite grenouille devint une demoiselle merveilleusement belle, la carotte un vrai carrosse et les six petites souris des chevaux. Alors le Simplet embrassa la jeune fille, se fit emporter au galop de ses six chevaux et amena la belle chez le roi. Ses frères arrivèrent ensuite : ils ne s’étaient donné aucune peine pour chercher une belle femme et ramenèrent les deux premières paysannes venues. Lorsqu’il les vit le roi déclara :
- C’est au cadet que le royaume appartiendra après ma mort.

Alors les deux aînés se mirent de nouveau à rebattre les oreilles du roi de la même protestation :  " Nous ne pouvons pas admettre que le Simplet devienne roi ", et ils demandèrent à ce que ce privilège revienne à celui dont la femme arriverait à sauter à travers un anneau qui était suspendu au milieu de la grande salle. " Nos paysannes en seront bien capables, se dirent-ils, elles sont assez fortes, par contre la délicate demoiselle va se tuer en sautant. "
Le vieux roi céda encore une fois à leur prière. Les deux paysannes prirent leur élan et certes elles sautèrent à travers l’anneau, mais elles étaient si lourdes qu’en retombant, elles se brisèrent bras et jambes. Ce fut alors le tour de la belle demoiselle que le Simplet avait ramenée, et elle traversa l’anneau d’un bond aussi légèrement qu’une biche : cela fit définitivement cesser toute opposition. C’est ainsi que le Bêta reçut la couronne et que longtemps il régna en sage.

· Lecture oralisée du conte, explication du vocabulaire inconnu des élèves.

Travail individuel sur la fiche suivante :

I : …………………………………………………….

Délimitez la situation initiale

Qui sont les personnages présents ?

Relevez les mots qui les caractérisent. Quel est celui qui est dévalorisé ? Pourquoi ?

II :………………………………………………………

Quelle phrase marque le déclenchement de l’action ? Quelle est l’épreuve à accomplir ?

Quel rôle joue le roi ici ?

Quelle est la principale raison qui peut pousser le fils à agir ?

III :……………………………………………………

Combien y a-t-il d’épreuves à accomplir ?

En quoi consistent ces épreuves ?

Qui est le héros du conte ? Quels sont les deux noms qui le désignent ? Pour quelle raison est-il le héros ?

Qui s’oppose au héros ? Commente et pour quelle raison ?

Qui aide le héros, de quelle façon ?

En quoi la grenouille est-elle extraordinaire ?

Relevez un passage qui présente une série de métamorphose. Quels éléments sont métamorphosés ? En quoi ?

IV :……………………………………………………

Quel événement met fin au conte ?

V :………………………………………………………

Mettez en relation la situation initiale et la situation finale. En quoi y-a-t-il eu transformation dans la situation du héros et des autres personnages ?

Comment vous paraît la situation finale ? Relevez un mot qui justifie votre réponse.

Pour qui y-a-t-il eu échec ? Quel est-il ?

Pour qui y-a-t-il eu réussite ? En quoi consiste cette réussite?

 

· On demandera aux élèves de faire la liste des personnages, et d’indiquer quel classement leur paraît logique.

On en arrive rapidement à la distinction héros / opposants / adjuvants

Le héros  
Les opposants  
Les adjuvants

 

On fera compléter un schéma aux élèves en leur expliquant que ce classement s’appelle le schéma actantiel et qu’il sert à classer les personnages selon leur rôle dans l’action.

 

La distribution des rôles dans le conte

Très souvent, l’action du conte est organisée par le rôle que jouent les personnages ; ceux-ci peuvent remplir l’une des fonctions suivantes :

Ce qui pousse à agir le héros : on l’appelle le destinateur. Il peut s’agir d’un autre personnage ou encore d’une force intérieure (l’amour, la jalousie…)

Ce que cherche à obtenir le personnage : c’est l’objet de la quête. (il peut désirer un mariage, la richesse, le pouvoir…)

Ce qui va aider le héros : c’est l’adjuvant il peut s’agir d’un être réel ou surnaturel, d’un objet magique…

Ce qui va s’opposer au héros : c’est l’opposant. Il peut s’agir d’un personnage réel ou surnaturel, d’un objet magique.

Il faut encore déterminer à qui la quête profite, c’est le bénéficiaire. Elle peut profiter au personnage lui-même, à un autre personnage…

Dans le conte les trois plumes :

Le héros, c’est le Simplet.

Le destinateur : c’est le roi

L’objet de la quête : succéder au roi

Les adjuvants : ce sont les grenouilles

Les opposants : ce sont les frères

Le bénéficiaire, c’est le Simplet.

 Séance n°7